Grumfïr Karlsgarr rangea le monoculaire à sa ceinture et rampa lentement à reculons du promontoire qu’il avait choisi comme poste d'observation. Puis il regagna les entrailles du massif rocailleux où son clan nomade bivouaquait depuis quelques jours.
En marchant dans l’obscurité, pensif, il se maudit lui-même pour son excès de prudence.
En effet, en voyant les pillards s’affairer à démanteler l’épave de la frégate impériale, tels des crabes des sables sur la carcasse d’un Sand Ox, il avait pensé naïvement qu’ils l’auraient abandonné faute d’équipements lourds pouvant s’attaquer aux chambres à fusion. Alors, ils auraient pu travailler à leur tour, patiemment et mettre à profit leurs expertises pour atteindre les très précieuses piles d’énergie si convoitées.
C’était sans compter sur la rapacité des gangers du secteur. Après le va et vient des éclaireurs, qu’il pensait être des pilleurs isolés, voilà que de longues et grosses bandes poussiéreuses convergeaient vers son objectif , annonciatrices de convois lourds en mouvement.
Après le menu frottin aux dents fragiles, voilà que des charognards aux puissantes mâchoires avaient flairer le festin. Nul doute qu’ils seraient en capacité de violer l’accès des chambres.
“ Tellement arrogants... tellement puérils... tellement éphémères...” se dit-il à lui-même.
Grumfïr méprisait les humains de Necromunda. Ils se pensaient supérieurs, traitant les Cognats d’abhumains, de “squat” comme ils leur plaisaient à les appeler. Mais que connaissaient ils des Cognations ? Des Ligues ? Du Votann ? Du Grand Tout ?
“ Rien ! “ Se cria-t-il intérieurement, se rendant compte par la même occasion qu’ils avaient réussi à l’énerver.
L’espace ne coulait pas dans leur veine, ils étaient faibles, leur priorité était toujours d’écraser les autres, l'individualisme au détriment de l’union, se mentant à eux même grâce à la figure de leur “Empereur Dieu”.
"Tssss ! "
Grumfïr cracha au sol et le son résonna longuement à travers les boyaux vides. Il continua sa marche d’un pas décidé, en tâchant de se calmer et de se rappeler ses priorités.
Etre exclu d’une guilde est déjà une immense honte. Devenir un paria au sein des ligues Votann était pire encore. C’était le plus grand déshonneur qu’un Cognat puisse trouver. Même si la perte d’une cargaison entière de ressources précieuses n’était pas de son fait, Grumfïr était alors Maître de Charte du convoi spatial de mineurs, et c’était donc à lui qu’il revenait d’assumer la catastrophe auprès de la guilde, de la Cognation, puis de la Ligue.
Chez les Votanns, le gaspillage est passible de mort. Mais Grumfïr n’était pas du genre à choisir la facilité. La mort aurait été trop douce.
Lui ainsi que son clan, dont la loyauté surpassait la honte, partirent de leur monde natal en tant que paria, pour venir se mêler à la population de Necromunda, habituée à voir des “squats”.
L’idée de départ était surtout de temporiser, pour réfléchir à leur avenir, à leurs options, à leur rédemption...
Très vite, ils se rendirent compte que le monde de Necromunda offrait des possibilités de richesses et de technologies à ceux qui savaient où fouiller, où creuser. Le cratère de Cinderak en faisait parti.
C’est ainsi que naquit l’idée de se racheter. De ramener à sa guilde l’équivalent de la perte afin d’effacer sa dette au sein de la Cognation.
Plus les intérêts.
Cette frégate impériale pouvait bien être la clef ouvrant la voie vers un retour à son monde d'origine. Retrouver la “grande famille”, ne plus faire qu’un avec eux et l’univers infini.
Grumfïr déboucha dans la caverne qui leur servait de camp de base.
“ C’est le moment les gars, on ne peut plus attendre, il faut se lancer !”
Tous se levèrent comme un seul Cognat, déjà en état d’alerte depuis des heures, à vérifier leurs équipements, très déterminés.
“Ce sera peut-être notre seule occasion avant longtemps ! Tâchons de ne pas la louper ! Compris ?!”
“OUI MAITRE DE LA CHARTE !!! “
“Pour la Cognation d’Uraak ! Pour la ligue Thurienne ! Pour le Votann ! Pour l’espace qui coule dans nos veines !" Harangua Grumfïr.
“POUR URAAK !!! POUR LA LIGUE THURIENNE !!! POUR LE VOTANN !!! POUR L’ESPACE QUI COULE DANS NOS VEINES !!!” rugirent son clan.
Il tira alors la bâche qui recouvrait leur véhicule lourd, puis posa une botte de fer sur le premier marchepied...
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